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Les nouveaux médicaments contre l'obésité : une révolution dans la prise en charge des patients
le 28/02/2025
À l'occasion de la Journée mondiale de l'obésité du 4 mars, le Dr Yann Matussière, médecin nutritionniste au Centre Spécialisé de l'Obésité (CSO) de la Clinique de la Sauvegarde (Ramsay Santé) à Lyon, fait le point sur l'arrivée de nouveaux traitements médicamenteux qui pourraient transformer la prise en charge des patients.

Ces médicaments innovants, commercialisés depuis 2024, offrent de nouvelles perspectives thérapeutiques pour les personnes souffrant d'obésité.
Quels sont les nouveaux traitements médicamenteux disponibles contre l'obésité et comment fonctionnent-ils ?
Deux médicaments majeurs sont désormais disponibles en France : le Wegovy®(semaglutide) depuis octobre 2024 et le Mounjaro® depuis novembre 2024. Ces traitements appartiennent à la famille des analogues des incrétines, hormones naturellement produites par notre intestin. Le Wegovy® mime l’action d’une hormone, le GLP-1, tandis que le Mounjaro® (tirzepatide) en mime deux, le GLP-1 et le GIP. Ces médicaments aident au contrôle de l’appétit et aussi au contrôle de la glycémie chez les patients diabétiques.
Il est important de ne pas confondre le Wegovy avec l'Ozempic®, qui contient la même molécule (semaglutide) mais à des dosages plus faibles, car il est destiné au traitement du diabète de type 2. Cette confusion a d'ailleurs créé une polémique lorsque l'Ozempic® a été détourné de son usage initial pour la perte de poids. Ces médicaments agissent sur différents organes : le pancréas, l'estomac et le cerveau. Leur principal effet est de diminuer la sensation de faim et les envies de manger, ce qui entraîne une perte de poids. Il s'agit de traitements injectables hebdomadaires, avec une perte de poids moyenne de 15 à 20 % en 12 mois.
Quels sont les effets indésirables de ces nouveaux traitements ?
Ces médicaments peuvent provoquer principalement des effets digestifs, avec des nausées, des vomissements, des diarrhées ou de la constipation. Il existe aussi un risque rare de pancréatite. C'est pourquoi nous augmentons progressivement les doses pour minimiser ces effets indésirables. Il faut noter que certains patients répondent très bien aux traitements tandis que d'autres peuvent être moins réceptifs. Nous avons moins de recul que sur la chirurgie, qui bénéficie de 20 ans d'expérience. Cependant, l'avantage est que si les effets secondaires sont trop importants, l'arrêt du traitement permet un retour à la normale en quelques jours.
Quelle comparaison entre ces traitements et la chirurgie bariatrique ?
La chirurgie bariatrique reste plus efficace, avec une perte de poids de l'ordre de 25 à 30 %. Les critères d'accès diffèrent également : la chirurgie nécessite un IMC supérieur à 40, ou supérieur à 35 avec des complications liées à l'obésité, tandis que les médicaments peuvent être prescrits dès un IMC de 35. Le principal frein actuel est le coût de ces traitements qui peut s’élever entre 250 et 300 euros par mois. Ces médicaments ne sont pas encore remboursés par la Sécurité sociale, alors que la chirurgie est prise en charge à 100 % par l'Assurance Maladie. Toutefois, il semblerait que le Wegovy® pourrait être remboursé d'ici à l'été 2025.
Comment envisagez-vous l'avenir de la prise en charge de l'obésité ?
L'obésité est une maladie chronique complexe, qui nécessite souvent une prise en charge pluridisciplinaire sur le long terme. À l'avenir, nous nous dirigeons vers une approche combinée, similaire au traitement du cancer, où chirurgie et médicaments pourront être utilisés de manière complémentaire. Certains patients pourront bénéficier d'un traitement médicamenteux seul, d'autres de la chirurgie, et dans certains cas, les deux approches pourront être associées. Nous travaillons actuellement sur le 'phénotypage' des patients pour déterminer les meilleurs schémas thérapeutiques selon les profils. Cette évolution contribue aussi à faire reconnaître l'obésité comme une véritable maladie, ce qui aide à lutter contre la stigmatisation des patients.
Comment lutter contre la stigmatisation des personnes atteintes d'obésité ?
Cela passe par la sensibilisation de la population. Il est essentiel de faire comprendre que l'obésité est une véritable maladie. Cette reconnaissance permet déjà de déculpabiliser les patients qui sont souvent jugés uniques responsables. C'est une maladie complexe qui implique des facteurs génétiques, environnementaux et sociaux. Nous menons des actions de sensibilisation, notamment auprès du personnel soignant qui peut parfois, même involontairement, avoir des comportements stigmatisants. Les ateliers de sensibilisation prévus à l’occasion de la Journée Mondiale de l'Obésité le 4 mars permettront aux soignants de mieux comprendre les difficultés quotidiennes rencontrées par les patients en situation d'obésité.